jeudi 9 octobre 2008

Femmes enceintes, vous êtes fichées


Le droit à l'avortement n'est pas de ceux dont on peut se féliciter d'avoir gagné la lutte une fois pour toutes.


En Pologne, après avoir pu avorter librement jusqu'à la chute de l'URSS, les femmes ont vu ce droit progressivement restreint, sous l'influence de l'Eglise catholique et de gouvernements ultraconservateurs, aux cas de viols, d'inceste, d'anomalie grave du fœtus ou de menace pour la santé de la mère.
On se souviendra d'ailleurs que, même dans les circonstances permises par cette loi, ce droit a déjà été bafoué.

Aujourd'hui, nouvelle pierre à l'édifice déjà solide des anti-choix : le lancement souhaité d'un projet de suivi (on entendra fichage) des femmes enceintes.

Ce système serait basé sur l'inscription volontaire des femmes enceintes (placez une grenouille dans de l'eau froide que vous portez progressivement à ébullition, air connu), ce qui leur permettrait de bénéficier d'examens médicaux supplémentaires et de délais moins longs pour ceux-ci.
En cas d'absence à ces rendez-vous, une sage-femme prendrait contact avec la femme.
Conséquences :
- disparition du secret médical : les médecins devraient communiquer les informations relatives à leurs patientes au gouvernement
- les femmes enceintes voulant avorter se garderaient bien d'aller chez le médecin, d'où une plus grande menace sur leur santé.

L'objectif complémentaire avoué de ce programme est de lutter contre la possibilité d'avorter clandestinement. C'est le raisonnement absurde des extrémistes anti-choix : interdire l'avortement entraîne une augmentation des avortements clandestins. Lutter contre ces derniers ne fait qu'accroître la pression sur les femmes enceintes, qui ne se résigneront certainement pas à mener une grossesse à terme si elles peuvent trouver d'autres solutions, à leurs frais, à leurs risques et périls. Finalement, on est pour la vie, mais pas n'importe laquelle. Pas celle des femmes qui ne marchent pas dans le droit chemin prévu pour elles, en tout cas.

Le texte complet ici et d'autres articles ici et là.

Et merde. Je suis encore tranquille pour le moment, dans mon pays, on viendra pas me foutre une caméra dans l'utérus pour vérifier ma soumission à une loi qui confine à la torture (imaginer devoir poursuivre une grossesse contre mon gré provoque en moi une rage indescriptible).
Ici, ouais, j'ai encore la paix. Pourtant, parfois, je croise des fanatiques, du genre à considérer qu'un embryon est plus important que le libre-arbitre d'une personne existante, vomissant leur logorrhée habituelle sur le droit à la vie, la vérité absolue, l'amalgame entre fœtus et personne.
Et même si ça ne sert pas à grand-chose, ça défoule :




NB : cet autocollant nauséabond -exemplaire d'une série affichée dans le même quartier- est resté intact plusieurs semaines avant que je ne prenne mon indélébile et mes clefs pour le lacérer avec bonheur. Myopie des passants ? Résignation ? Extrême tolérance ? Je m'en foutisme ?

lundi 22 septembre 2008

"Il m'a choisie quand même"

No comment sur la presse féminine. Ou plutôt si, commentaire mais il y aurait tant à en dire ! En passant devant les librairies, ou en lisant ces magazines dans les salles d'attente, j'ai l'impression de retourner dans les années 50 et dans l'art assumé de la double-contrainte, qui empêche le sujet de réfléchir à une situation paradoxale.
Toujours plaire tout en doutant de l'effet produit. Ne jamais évoquer les capacités intellectuelles. Entretenir le manque de confiance en soi et l'obsession de l'apparence, de l'approbation par le regard superficiel des autres. Faire acheter au moins la moitié du magazine pour des pages de pub (pour des produits inutiles et potentiellement toxiques). Presser les lectrices d'acheter et acheter encore, tout, n'importe quoi, une semaine on achète pour se faire plaisir (c'est toujours mieux que de manger), la semaine suivante on plaide pour le développement durable ... Faire régime avant l'été et après l'été. Les rondes sont belles.
Tout ça pour quoi ? Pour mériter d'être choisie (on notera beaucoup l'emploi du passif) par un Homme.

En gros, s'emprisonner dans des normes aliénantes tout en se répétant combien c'est bon d'être une femme.

Florilège hebdomadaire :

Handicapée, malentendante...
'Il m'a choisie quand même"
Il m'a choisie ...: c'est l'homme qui choisit sa (ses) partenaires. Les femmes doivent bien évidemment briller (et se faire concurrence) pour attirer son regard et ses attentions mais c'est toutefois à lui que revient la décision finale. Il prend ou il jette. "On" doute ou on pleure.

... quand même : avec un "défaut", comme un vulgaire objet de consommation bradé sur le marché de la bonne meuf, pour reprendre l'expression de Virginie Despentes. Parce que tous les hommes sont parfaits bien sûr, aucun d'entre eux n'est handicapé ou malentendant. Quand bien même, ils n'en perdraient pas le privilège de faire leur choix. Tout homme est forcément un prince charmant. Son seul défaut est de ne pas rabaisser la lunette des WC, pour résumer.

Ils passent au détecteur de mensonges
Ce que les hommes veulent au lit


La sexualité masculine est forcément coupable (le détecteur de mensonges), les hommes ne seraient pas aptes à demander ce qu'ils veulent réellement à leurs partenaires (ou comment perpétuer le syndrome de la maman et de la putain).


De mémoire, j'évoquerai aussi ce titre-là :
Comment séduire un homme : bégayer, le frôler, l'écouter parler

Comment séduire un homme en l'assurant de sa supériorité à travers un comportement de femme-enfant indécise et un peu idiote. Versus partager ses expériences et ses opinions dans une discussion, d'une voix assurée et sans hésitation. Considérer qu'un homme ne doit pas se sentir symboliquement -ou non- supérieur à une femme pour exister, qu'une femme n'a pas à se soumettre à ce cirque pour en tirer des avantages (mais... lesquels ???), ce serait pas un peu plus évident ?

On est vraiment pas loin des encyclopédies domestiques, ces briques que les filles devaient étudier (il n'y a rien de naturel là-dedans, au grand dam des essentialistes qui pullulent dans ces magazines) lors de leur scolarité il n'y a pas si longtemps.

Le pire, c'est que ce rouleau compresseur idéologique est tellement performant que j'aurais peur d'être influencée par cette vulgate si je lisais régulièrement ce type de presse. Comment font les lectrices qui, le plus souvent, lisent ça pour se détendre (!), au second degré, ou par habitude ? Comment résister à ce formatage en règle si ce n'est en le boycottant ?

Plongeon

Je me lance...

J'ai besoin d'un espace pour exprimer mes idées féministes - ou autres. Je n'apprécie pas les espaces, virtuels ou non, déjà conquis par un seul mode de pensée, et l'on sait combien il est difficile de faire passer ses idées en société, cadenassés que nous sommes par l'obligation de rester hypocrite en toute circonstance pour la paix sociale. Voilà pourquoi je tente l'expérience du blog si tendance à l'heure actuelle. On verra si j'arrive à m'y tenir et à trouver de l'inspiration.

Ce blog est surtout destiné à relayer de l'info, à pousser quelques gueulantes et, je l'espère aussi, quelques modestes constatations à tête reposée sur ce qui m'entoure, de près ou de loin.

Bonne lecture si vous décidez de rester un petit moment ici...