mercredi 24 juin 2009

La cuisine moderne selon les services publics

Un appel d'offre public, rédigé donc par un organisme public, pour une campagne de pub dont on m'a fait part il y a peu :

Quelques organismes de promotion européens souhaitent mettre en oeuvre une campagne de promotion commune relative aux pommes de terre fraîches, son objectif est de défendre les parts de marché des pommes de terre par rapport aux riz et pâtes. La campagne doit démontrer aux ménagères de 25 à 45 ans que les pommes de terre fraîches ont tout à fait leur place dans la cuisine moderne.

 
Moi j'imagine bien une campagne de jets de pommes de terre bien fraîches et bien fermes en direction de l'auteur-e (?) de ces lignes.
Bah oui ça ferait aussi la promotion des produits du terroir mais d'une manière un peu plus moderne.

samedi 20 juin 2009

Mix anti-familial anonyme

La femme surpuissante, c'est un peu celle qui accepte de plein gré son rôle féminin (familial, je me limite à ça) et en rajoute des couches au cas où on n'aurait pas compris...


La femme surpuissante, overprotectrice, a fait passer sa famille avant sa vie personnelle. En tant que femme (et juste femme), elle se devait d'avoir des enfants - des garçons de préférence - et de les adorer plus que tout au monde. Le monde, d'ailleurs, elle s'en fout complètement, la bombe atomique peut tomber à côté de chez elle qu'elle ne fera attention qu'à la couleur des yeux de ses fils.

La femme surpuissante se complaît à penser que ses enfants ne se porteraient jamais mieux qu'avec elle, même lorsque ceux-ci ont depuis très longtemps dépassé l'âge du biberon (pardon, du sein maternel).

La femme surpuissante est aussi normative à souhait. Obsédée par le physique des autres et des siens, sexiste, hétérocentriste, parfois raciste pour ajouter du piquant lors des réunions familiales. Elle vote à droite ou ne parle pas politique. Quand on lit ou regarde les torchons berlusconiens ou sarkoziens, faut pas s'étonner.

La division sexuelle du travail ne rencontre aucune opposition de sa part, car enfin, les femmes sont faites pour faire le ménage et pour avoir des enfants. Et si ces derniers ne correspondent pas à la projection faite d'eux in utero, elle leur signalera soigneusement qu'ils ne sont pas comme on le voudrait, par des critiques sournoises ou des remarques acides emballées dans un sourire mielleux ou un côté leçon de sagesse.

L'homosexualité n'est jamais abordée, car elle n'existe pas dans sa famille parfaite. Si elle existait, la femme surpuissante en serait dévastée. On en sait même pas si elle s'en remettrait. Déjà que la moindre allusion à l'homosexualité met toute la famille mal à l'aise...

La mixité des couples est inexistante elle aussi, imaginez, un des siens gaspiller ses précieux gènes avec un ou une - petit geste de la main sur le visage - vous savez, bazané-e...

Quand au divorce... Drame familial qui, plusieurs années après son application, la fait encore chavirer.
Le divorce c'est l'échec, la fin de l'équilibre familial, la fin du pater familias, de la berline 4 personnes (plus le chien) roulant sans fin sous le soleil de juillet en écoutant de la variété française.



Le divorce c'est aussi les lourdes pensions alimentaires que doivent payer ses fils, en plus du malheur qui les frappe. Vous pensez bien, ils ont dû - apprendre à - vivre sans une femme, actionner le bouton "on" de la machine à lessiver, faire la vaisselle et garder leurs gosses à intervalles réguliers. Transition inhumaine et impossible : un homme n'a pas l'intelligence ménagère. En outre, leurs femmes ne sont plus présentes pour leur fournir tout ce travail gratos et ils doivent encore leur donner du fric !

Ses belles-filles n'ont de toute façon jamais été à la hauteur de ses attentes à elle : l'une était mauvaise mère parce qu'elle travaillait, l'autre handicapée (son pauvre fils allait devoir un peu travailler à la maison, monstreux), la troisième anormale car sans enfants. Comme la femme surpuissante sait ce qui est mieux pour ses héritiers mâles, elle n'hésite pas à débarquer chez eux en furie ménagère, le balai et le seau à la main, pour remettre l'ordre que sa faignasse de belle-fille n'est plus capable de maintenir. Là, à la rigueur, elle pourrait peut-être tolérer une séparation : "elle ne nettoie plus rien - ils mangent des conserves - elle ne fait même plus la lessive".

Si l'une de ses filles divorce après quelques décennies d'un mariage déprimant, elle lui lancera l'avertissement ultime : "c'est quand même ton mari".





Toute une vie gâchée par une éducation de merde, frustrée par le manque d'études, de loisirs, parfois même de culture. Toute une vie passée à reproduire ce schéma chez les enfants, à s'offusquer des évolutions sociétales ou à ne pas les comprendre, à leur pourrir la vie avec les valeurs avalisées du patriarcat, à limiter leurs possibilités de vie comme on lui a limité les siennes.
Les femmes sont souvent leurs propres oppresseures, c'est pas nouveau.

lundi 8 juin 2009

Encore sur la mauvaise route ces féministes occidentales

Naomi Wolf, un nom connu chez les féministes n'est-ce pas ?

Je n'ai lu aucun de ses livres, j'ai entendu parler de son best-seller, The Beauty Myth. Le survol de sa biographie sur wikipédia ne laisse rien présager de bizarre (j'entends par là qu'elle n'a pas l'air d'être du genre essentialiste qui se proclame féministe), et pourtant ... Elle s'est fendue d'un article consternant (un de plus) sur les prétendus excès du féminisme occidental, responsable de la "guerre des sexes" et de la marchandisation des corps après la libération sexuelle. L'article original est disponible ici.

C'est vrai que depuis les années 60, on a vu beaucoup de féministes à la tête des entreprises, d'où le pouvoir qu'elles ont eu pour marchandiser le corps féminin. Oui, on sait, ces féministes qui haïssent les hommes et à qui on peut reprocher certains excès...

Quelques extraits :


Le consensus qui apparaît en Inde en faveur de davantage de droits et de liberté pour les femmes [...] n’a pas encore et ne va peut-être jamais porter atteinte au lien de confiance et d'amitié entre hommes et femmes. Et il ne va sans doute pas pousser l’Inde dans la direction d'une société de solitude, individualisée et fragmentée - avec la révolution sexuelle transformée en marchandise - que reflète le féminisme occidental autocentré.
Il faudra qu'on m'explique ce qu'est ce fameux lien de confiance et d'amitié entre hommes et femmes en Inde. Celui où les femmes remercient leur mari de les brûler à l'acide ? Ou celui qui fait que les fillettes, quand on les laisse naître, sont moins nourries, moins soignées et moins éduquées que leurs frères ? Ici c'est vrai, hommes et femmes se regardent en chiens de faïence, prêts à se rentrer dans le lard à tout bout de champ, car ce lien si beau et si humain n'existe plus.
Femmes et hommes, hommes et femmes, ces deux espèces différentes vouées à la cohabitation. Il faudrait penser à envoyer quelques émissaires spéciaux de chaque camp fumer le calumet de la paix dans nos contrées si éloignées de l'état idéal (primitif tant qu'on y est !).

Cette version du féminisme - l’exigence d’égalité pour la femme qui préserve néanmoins son rôle spécifique au sein du foyer, la primauté donnée à la famille et les droits considérés dans le contexte de la communauté et de la spiritualité - paraît être un excellent correctif des excès du féminisme occidental.
[...]le féminisme occidental aurait pu se développer autrement qu’il ne l’a fait et qu’il peut encore changer pour adopter une définition plus satisfaisante et plus humaine de la notion d’égalité. Simone de Beauvoir, dont l’œuvre-phare, "Le Deuxième Sexe", a servi de référence au féminisme occidental d’après-guerre, était une existentialiste, mais elle n’était ni une épouse ni une mère ni une femme de foi. Aussi, sa réflexion plaçait-elle la liberté de la femme dans un contexte laïque et individualiste où l’individu est isolé et dans lequel la "liberté" signifiait une pure autonomie plutôt qu’une intégration égalitaire dans un tout - comportant la famille, la communauté et même Dieu.

Revenons aux sociétés holistes d'antan, il est encore temps cher-e-s ami-e-s. Remettons-nous à croire en dieu, prenons conscience du rôle spécifique que nous avons à remplir au sein de notre foyer (ce coeur sociétal) et investissons-nous dans notre communauté au lieu de nous replier sur nous-même et sur nos objets de consommation.
Même le pape ne trouverait rien à redire à ça.

En tant que femmes occidentales, nous avons les capacités d’analyse, nous savons quels sont nos problèmes et nous disposons d’une méthode pour y faire face - mais nous manquons de volonté politique et organisationnelle. Aussi le leadership bascule-t-il vers les femmes des pays en développement. Leurs besoins sont plus urgents, et, franchement, leurs problèmes sont beaucoup plus graves que les nôtres. (...) Si l’une de ces courageuses femmes afghanes (...) écrivait (...) le texte marquant des cinquante prochaines années du féminisme non-occidental, il sera sans doute imprégné de l’idée d’égalité et en même temps très concret. Il montrera sans doute que le monde est davantage que la somme d’individualités en concurrence, essentiellement tournées vers la consommation, ou qu’une guerre des sexes.

Voilà, tout s'explique. Nous les féministes occidentales, on est un peu trop idéalistes mais en même temps tellement matérialistes ! Puis on manque de volonté pour imposer nos volontés aussi. C'est tellement simple pourtant ! Un peu de concret que diable !
Et puis franchement, allez je le dis : toi, la féministe occidentale fainéante, athée et individualiste, va donc voir en Afghanistan (si j'y suis) ! Ca te remettra dans le droit chemin !

samedi 6 juin 2009

Dialogue de sourdes

Ma mère me parle de son neveu, 10 ans environ, qui doit recouvrir ses cahiers d'école, comme toute sa classe.

- Quelle idée de demander ça à un garçon !
- Pourquoi pas ? Pourquoi les garçons ne devraient pas savoir couvrir leurs cahiers ?
- Mais parce que ! Ça ne les intéresse pas ! Ils ne sont pas soigneux.

Je tente alors naïvement cette question :
- Pourquoi ne pourrait-on pas apprendre la même chose aux filles et aux garçons ?
- Mais parce qu'ils ont des besoins différents !, me répond-elle d'un air exaspéré.
- Mais c'est faux ! (Mon air calme du début s'évanouit petit à petit). Ce sont les parents et la société qui attribuent des activités et des besoins différents à leurs enfants selon leur sexe (genre, peu importe ici) ! Ça commence à la grossesse, on met du rose pour les filles, du bleu pour les garçons pour schématiser. Puis on va mettre la fille à la danse et le garçon au judo, puis on va apprendre à la fille à faire le ménage et on va offrir des mécanos au garçon... c'est tout un engrenage qu'on construit, ça n'a rien de naturel !
- Ce n'est pas vrai !, dit-elle d'un air obstiné.

- Prenons un exemple : quand j'habitais encore chez toi, je devais régulièrement nettoyer la salle de bains ou les escaliers... reconnais que tu n'as jamais demandé ça à mon frère !
- Faux : tu n'as jamais rien fait dans le ménage.
(Comme j'ai entendu cette phrase symptomatique adressée à la fille ingrate et arrogante que j'étais dès que j'osais me rebeller genre, un peu. Limite épitaphe : BadlyDrawnGrrrl, n'a jamais rien fait dans le ménage).
Ton frère fait tout ce que je lui demande. Il fait sa chambre, repasse son linge...
- M'enfin, tu sais bien qu'un asthmatique qui rentrerait dans sa chambre en ressortirait en ambulance ! (Et après vérification auprès de lui, il m'a bien confirmé que c'était le cas et qu'il n'a jamais dû nettoyer cette bête sdb... en gros il se borne à ranger dans le lave-vaisselle quand il y pense)
- Mais tu ne lui a JAMAIS demandé de nettoyer la salle-de-bains ! Ça ne t'est jamais venu à l'esprit. Et cette éducation perpétue les stéréotypes : la fille doit faire le ménage, la cuisine, les gosses, le garçon peut rêver d'être ingénieur avec ses mécanos et son futur gros salaire et sa future grosse retraite, et on comptera sur sa future femme pour faire la salle-de-bains.
- On ne changera pas le monde !!! (ah, l'argument choc qui clôt tout débat). Si tu crois que tu peux le changer, pourquoi ne fais-tu pas des enfants pour voir si ce que tu dis est vrai ? (Tentative pathétique de me rappeler son souhait d'être grand mère)
- Mom... quel argument ! en plus j'ai pas envie d'un laboratoire psychologique vivant...

Et Mom change de sujet, exaspérée, se promettant à l'avenir d'éviter toute conversation sur le féminisme avec sa fille.
Sans que moi je n'aie eu le courage ou l'affront de lui dire que sa vie est l'exemple parfait des limitations imposées aux femmes par notre société, tout comme l'est celle de sa mère et ainsi de suite. Elle nie, incapable de faire le lien entre ce qu'elle a pu vivre dans sa vie comme événements pas toujours drôles ou décisions imposées plus ou moins clairement, et cette inégalité persistante dans une éducation qu'elle avalise totalement comme étant naturelle.

Finalement, c'est grâce à elle que je suis devenue féministe je crois.




Note : le bouquin en illustration, Du côté des petites filles d'Elena Gianini Belotti, publié en 1973, est un des classiques du féminisme que je recommanderais à tout le monde. Encore d'actualité pour certains aspects et très bien documenté.